Sommes-nous à la hauteur du Président Poutine ?
L’interview qui a été diffusée hier soir, simultanément sur TF1 et Europe 1, a montré une fois de plus la dramatique erreur géostratégique que l’Occident est en train de commettre face à la montée en puissance de la Russie.
Car, lorsque l’on reproche à l’ogre rouge de réactiver la guerre froide ne sommes-nous pas également prisonniers des vieux réflexes qui étaient à l’œuvre dans nos relations avec l’Union Soviétique ?
J’en veux pour preuve la relance inexistante des 2 journalistes, pourtant «stars» de leurs médias respectifs, quand le Président Poutine a parlé de «Confédération Européenne dont la Russie pourrait être membre». Comment est-ce possible que le plus grand pays du monde (En termes de superficie et sans aucune autre considération), voisin immédiat de la plus grande zone économique de ce même monde (L’Europe) ne consente pas plus d’attention à une remarque d’une telle importance ?
Se sont poursuivis des échanges quasi surréalistes pendant lesquels «nos» journalistes ont tenté de déstabiliser le nouveau Tsar avec des questions qu’ils avaient sans doute imaginées comme gênantes : «Les Droits de l’Homme», «l’Ukraine», «l’homosexualité», «les camps de travail», «le statut de l’opposition», «le développement de l’armée», «l’expansionnisme russe», etc.
A chaque fois, Vladimir Poutine a balayé d’un revers de main ce que ses interlocuteurs considéraient comme des attaques, démontrant qu’il n’était pas que ceinture noire de judo mais aussi et surtout «Maître es-Rhétorique».
«La Russie serait en train d’envahir l’Ukraine, billevesées», «Les USA ont des preuves ? Sont-ce les mêmes que celles grâce auxquelles ils s’étaient auto-arrogés le droit d’envahir l’Irak et de pendre son Président et qui se sont finalement révélées inventées ?» (ndlr : Le terme de «lessive» a même été utlisé par le Président), «La Russie aurait des visées expansionnistes ? Quel est le pays qui a le plus de bases militaires à l’étranger ? (ndlr : les Etats-Unis)», «Madame Clinton (ndlr : qui vient de déclarer que les actions actuelles de la Russie sont comparables à celles d’Hitler) n’a jamais été très subtile dans ses déclarations. Quand on dépasse les limites, on montre sa faiblesse mais pour une femme la faiblesse n’est pas un défaut», etc.
Le ping-pong entre des professionnels des médias qui se voulaient «sans complaisance» mais qui ont été finalement très «doux» et le Maître du Kremlin qui utilisait chacune de leurs piques émoussées pour égratigner, voire blesser, ses concurrents américains s’est conclu par une victoire par KO de l’ancien agent du KGB.
Ceci m’amène à cette réflexion finale, pourquoi l’Europe traite-t-elle avec autant de mépris et de condescendance un peuple ami et une partie aussi incontournable de son territoire ? Pourquoi «jouer» ainsi avec les Russes en se réfugiant par principe sous le parapluie (Atomique) américain ? Une politique européenne équilibrée ne devrait-elle pas ressembler à un cerveau fonctionnel, soit posséder 2 hémisphères ?
L’Ouest ET l’Est, tout comme il est nettement plus aisé de marcher sur 2 jambes qu’à cloche-pied, ne gagnerions-nous pas à être LES amis de nos amis américains ET russes, plutôt que les vassaux des USA ? (Voir à ce propos la chronique récente sur le TAFTA).
Vladimir Poutine n’est pas un modèle de dirigeant démocratique, tout comme la Russie n’est pas un paradis des libertés citoyennes, dire le contraire serait difficilement soutenable, cependant un dialogue respectueux des objectifs et des contraintes de chacun ne serait-il pas plus riche de potentiel qu’une resucée de la guerre froide ?
Hier soir, en écoutant cet interview, m’est revenue en mémoire cet enseignement de Lao Tseu vieux de plus de 2’500 ans :
«Choisis en politique le bon ordre. Choisis en affaires l’efficacité. Choisis pour agir l’opportunité. Ne rivalise point. Tu seras sans reproche»
Qui d’après vous le met le plus efficacement en œuvre ?
Bonne journée à tous